Critique de l’ouvrage de Suzanne Kemenang

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ENTREVUE  • JANVIER 2021

Nathasha Pemba, critique littéraire.

 
 

Mon parcours

Je réside à Québec et je suis titulaire d’un Doctorat en philosophie de l’Université Laval au Canada et de l’Institut Catholique de Toulouse en France. Je suis aussi écrivaine et critique littéraire.

Je suis auteure de deux recueils de nouvelles : Polygamiques et Les passants de Québec. J’ai, en outre, participé (2014) au recueil collectif des écrivaines du Congo-Brazzaville : Sirène des sables.

J’ai collaboré à cinq ouvrages collectifs dans le domaine de la philosophie et des Sciences humaines. Et j’ai publié plusieurs articles dans mon domaine de recherche.

Mon prochain livre qui est déjà en précommande sort le 30 novembre prochain en France. Il porte sur la croissance personnelle et s’intitule : Franchissements.

MES SITES

Suzanne Kemenang a publié son premier ouvrage, Les visages de la francophonie. Région de Durham en 2020. Elle écrit l’histoire de la francophonie de la région Durham à partir de vingt visages qui ont travaillé pour que la francophonie ne soit pas seulement économique, mais qu’elle soit avant tout une identité, une culture, une tradition.

Le livre est un beau livre du point de vue de l’esthétique. Cela est incontestable. On va donc commencer par là. La première de couverture qui est un assemblage de photographies soutenu par une belle mosaïque aux couleurs de la maison d’édition symbolise la diversité qui forme la francophonie de manière essentielle. Et le logo de la maison d’édition, à travers son titre très significatif, voire symbolique, nous rappelle que si nous venons tous d’ailleurs, nous sommes toujours accueillis quelque part. Et, c’est cela qui me paraît essentiel dans ce livre. On est chez soi partout, mais on ne perd pas ce qui nous constitue de manière intrinsèque. Tel est le message de ces francophones qui à partir d’une histoire d’amour qui dure depuis soixante-dix ans, rappellent que le travail, l’héritage, c’est de semer avec amour et détermination pour que subsiste cette francophonie. C’est d’ailleurs ce que nous rappelle Roger Brideau qui affirme : «Un francophone est comme un saumon, il peut flatter toute la rivière, mais il retourne chez lui.»

Au début des années 1940, des francophones s’installent dans la région de Durham. La majorité de ces nouveaux immigrants ne parlent presque pas la langue anglaise. Entre la nécessité de fondre dans la langue anglaise et de maintenir la langue française, les premiers pionniers francophones de cette nouvelle vague décident de mettre la main dans la pâte pour créer un univers fait de francophonies. Nostalgiques, les francophones se rassemblent pour mettre en place des lieux de vie en vue d’un bien-être francophone. On peut parler entre autres, du Club canadien français ou de la Fédération des femmes canadiennes-françaises. Ces organismes soutiendront d’autres projets comme la construction de la paroisse et de la première école de langue française. La communauté s’agrandit et avec elle la francophonie dans cette belle région.

Parler des gens

Parce que les gens sont les témoins,
Parce que les gens ont des choses à dire
Parce que chaque personne est unique comme l’est son expérience
Tel est le sens de ce livre
Parler des gens qui ont fait et qui font la francophonie de la région de Durham
Parler des gens qui font marcher les institutions
Parler des gens qui étaient et qui sont la raison même pour laquelle chaque francophone occupe un emploi où elle/il peut s’exprimer en français

Parler des gens qui permettent aux générations d’étudier aujourd’hui en français en Ontario

Raconter l’histoire de ces bâtisseurs francophones m’a tout de suite semblé important, non seulement pour leur rendre hommage et les remercier, mais aussi pour ceux qui viennent après et qui bénéficient d’un emploi et d’une éducation de qualité en français pour leurs enfants et leurs petits-enfants. Ils se poseront certainement des questions, mais ils ne mesureront pas suffisamment le chemin parcouru, les luttes menées et les batailles remportées avec foi et détermination afin de vivre en français dans cette belle région de Durham. 
Suzanne Kemenang

La francophonie entre culture et identité

La question de la langue est présente au cœur de la vie de chaque être humain. Elle marque notre identité à tous les niveaux de notre vie et nous ouvre au monde.

Quelques témoignages

Ma vie est complète. Si je n’étais pas née francophone, je serais moins impliquée et je n’aurais peut-être pas les mêmes besoins. ÊTRE FRANCOPHONE, c’est mon identité.
Rita Lacroix

ÊTRE FRANCOPHONE, c’est promouvoir la langue et la culture en encourageant une fierté et un amour pour le vivre en français.
Robert W. Fillion

ÊTRE FRANCOPHONE, pour moi, c’est d’abord appartenir au groupe fondateur du Canada et j’en suis fière.
Marcelle Jomphe

ÊTRE FRANCOPHONE, c’est une fidélité.
Gisèle Pilon

ÊTRE FRANCOPHONE, c’est une lutte qui ne démord pas, c’est le combat d’une vie
Raymond Léger

ÊTRE FRANCOPHONE, c’est tout pour moi.
Sylvie A. Landry

ÊTRE FRANCOPHONE, c’est avoir le réflexe de réfléchir et de parler en français, même si je peux parler d’autres langues.
Cirille Nyeck

Je suis une francophone dans l’âme, c’est mon identité.
Élaine Legault.

Mon point de vue

Ceci est un livre à la fois historique, sociologique et anthropologique. C’est un livre mémoire que chaque francophone de la région de Durham devrait lire et faire lire. C’est un legs, une reconnaissance, une Action de grâce, une justice… un pont. Oui, un pont parce qu’il sert de passerelle et de soutien. Sa lecture m’a fait penser à ce passage de la Bible :

Quand ton fils te demandera : pourquoi ?
[Ex 13,14].

Les enfants grandissent et s’interrogent. Ils s’interrogent et interrogent. Ils veulent savoir.

Pourquoi nous sommes ici, pourquoi nous devons préserver la langue française dans cette région, alors que les autres parlent anglais ? Tout part d’un questionnement. Ce livre constitue une partie de la réponse parce qu’il fait parler les pionniers, parce qu’il est un vis-à-vis des francophones, parce qu’il délègue une responsabilité, parce qu’il est un lieu d’échange et de dialogue.

Je souhaite aux lecteurs de ce livre des moments captivants et inspirants que moi j’ai pu en vivre à la lecture. Je vous souhaite de l’ambition et de la passion. Je vous souhaite de découvrir ces visages qui vont vous inspirer et vous aider à revoir votre rapport à la francophonie et aux autres langues parce qu’être francophone c’est aussi être ouvert à d’autres langues. Ce livre permet aussi de voir comment d’autres personnes se sont engagées pour une noble cause et comment nous pouvons le faire aussi à notre tour avec les outils de notre monde d’aujourd’hui. C’est dans cet esprit que notre francophonie peut avoir un sens.

Pour moi, ÊTRE FRANCOPHONE, c’est être capable de vivre en français dans son milieu immédiat, mais aussi dans son milieu plus large. S’exprimer en français dans son environnement, être capable de vivre l’essentiel de sa vie affective et émotive en français aussi, dans ce qu’on peut vivre de joie et de peine, et être capable de les vivre en français à mesure que l’on vieillit et le faire sans avoir besoin de lutter.
André Savard.

Suzanne Kemenang, Les visages de la francophonie. Région de Durham, Oshawa, Éditions Terre d’Accueil, 2020.

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