Pleins feux sur le métier de graphiste

 
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ENTREVUE  • Mars 2021

Marie Blanchard, designer graphiste.

 
 

Mon parcours

Artiste dans l’âme depuis toujours, j’ai fait les Beaux-Arts à l’Université Concordia de Montréal avec une majeure en Film d’animation. Près de 20 ans de carrière dans l’industrie du dessin animé ont suivi ces années captivantes.

De Montréal à Dublin, j’ai occupé plusieurs postes dans la chaîne de production. Profitant d’un creux dans l’industrie du dessin animé, j’ai effectué un retour aux études à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) en design graphique de 1992 à 1994.

En 2004, j’ai laissé définitivement l’animation pour mes nouvelles passions : le graphisme, l’illustration et l’édition de livres.

À l’emploi de diverses maisons de production dans le domaine de l’édition, j’ai pu parfaire ma formation en édition de livres avec toutes ses particularités : création de grilles graphiques, code typographique, mise en pages, etc. J’ai aussi eu l’occasion de toucher à plusieurs catégories de publications : édition scolaire, œuvres littéraires (romans, poésie, théâtre), essais, livres documentaires.

Depuis 2008, j’œuvre de façon indépendante comme graphiste en édition de livres et j’ai développé une clientèle variée : maisons d’éditions, magazines, auteurs indépendants.

En 2017, j’ai fondé Les Éditions du Grand Élan, une petite maison d’édition dans les Laurentides.

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1. Parlez-nous de votre métier de graphiste

Vers 2003, l’effondrement du domaine du dessin animé à Montréal m’a amené à faire un changement de carrière. Je me suis dirigée vers le domaine du graphisme que j’avais étudié lors d’un passage à l’Université du Québec à Montréal. À partir de 2006, j’ai choisi de me spécialiser en édition de livres.

Cette spécialisation du graphisme est peut-être moins privilégiée par les jeunes. Ils préfèrent le graphisme de marque (logos, affiches, etc.). Mais, pour moi qui en faisais une deuxième carrière, c’était tout indiqué. Je comptabilise donc près de 15 ans d’expérience dans le métier.

2. Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans ce métier?

J’aime beaucoup les beaux livres. J’adore les belles mises en page spacieuses et imagées. J’aime concevoir ce genre de livre. J’aime aussi la relation avec le client. C’est fantastique quand j’arrive à faire quelque chose qui lui plaît, qui l’épate.

3. À quel moment est-ce que vous intervenez dans le processus éditorial?

Comme graphiste, habituellement je n’interviens pas dans le processus éditorial. En fait, je ne suis même pas censée lire les textes. Mon devoir est de les présenter d’une manière visuellement agréable aux lecteurs. Les textes représentent la matière première avec laquelle je « sculpte » les pages du livre. Mon travail est de faire une présentation qui sera logique et continue d’une page à l’autre et d’en assurer l’uniformité.

Toutefois, je lis un peu en diagonale évidemment. Je dois savoir de quoi on parle pour faire correctement la mise en page. C’est dans ces conditions que je peux faire des suggestions au client. Aussi, si je découvre certaines erreurs ou fautes, je peux attirer l’attention du client et demander quelle action prendre.

4. Vous avez travaillé sur notre premier ouvrage, Les visages de la francophonie – Région de Durham. Parlez-nous de votre expérience.

J’ai eu le bonheur de travailler avec Suzanne Kemenang, sur son premier livre Les visages de la francophonie – Région de Durham.
Les défis dans ce projet furent d’abord de faire un livre qui soit vraiment dans l’esprit et dans l’intention de l’auteure. J’ai perçu que son but était de rendre hommage à une communauté et à ses pionniers. J’ai vraiment perçu son cœur là-dedans. Je me suis dit que je devais faire un livre qui reflète vraiment ça. Je voulais aussi que ce soit très facile à lire et à suivre pour les personnes concernées.

Ce sont surtout des gens d’un certain âge, alors tout devait être assez espacé, les caractères d’une bonne grandeur, le tout agréable au regard.

Je crois que les délais étaient quand même serrés de part et d’autre ce qui a entraîné des retards dans le calendrier de production. Mais, somme toute, avec la collaboration de la correctrice Emmanuelle Friant, avec laquelle j’avais déjà travaillé, tout s’est bien passé.

5. Qu’avez-vous le plus aimé dans ce projet?

Ce fut une très belle expérience pour moi. Je crois que ce que j’ai le plus apprécié dans ce projet été le contact avec Suzanne. Ça été plus qu’une cliente, je pourrais dire qu’elle est devenue une amie. Le but de son livre aussi m’a rejoint, car j’aime mettre les gens en valeur, surtout les « unsung heroes » de ce monde.

6. Vous êtes aussi éditrice et illustratrice, comment arrivez-vous à combiner toutes ces casquettes?

Le métier d’éditrice m’est venue de mon petit côté artiste/entrepreneure. Je ne voulais pas seulement me contenter de faire les livres des autres : je voulais faire mes propres livres ! Mon désir était de les rendre réels ; de les amener à existence. Tout a commencé en 2017, avec ce beau livre appelé Les gardiens silencieux de l’artiste Martine Cyr. Ce livre a marqué la naissance des Éditions du Grand Élan. Le Grand Élan est la montagne sur laquelle j’habite dans les Laurentides. C’était parfait comme nom. Mon but était de donner un grand élan aux artistes et aux auteurs. Puis ça été un roman de voyage. Mon ami, le globe-trotteur et grand explorateur Ugo Monticone avait écrit un roman lors d’un voyage au Guatemala. Je lui ai offert de le publier. Le roman Volcán est sorti en 2018.

En 2019, j’ai fait équipe avec l’auteure et illustratrice Isabelle Charbonneau pour publier son petit livre Le p’tit train du Nord. Ce charmant petit album jeunesse a eu un succès bœuf. Nous en avons vendu un premier tirage de 2 000 exemplaires et nous avons une nouvelle impression de 2000 autres exemplaires qui commencent à être distribués.

Évidemment, cette activité d’édition est un passe-temps en ce moment. Cela me demande beaucoup de temps et d’énergie, car tout est nouveau et à apprendre pour moi. Mais avec les années, j’ai mis en place des outils pour la comptabilité et j’ai développé un réseau de distribution.

Ce n’est évidemment pas facile de combiner toutes mes occupations. J’ai aussi des responsabilités familiales qui rentrent en ligne de compte. J’essaie de prendre les choses un jour à la fois, et de ne pas me mettre trop de pression, même si j’ai des projets pour d’autres livres sur la table. J’ai découvert que j’aime particulièrement l’édition jeunesse. Ça me renvoie à mon enfance et à mon amour pour le livre illustré.

7. Avez-vous des recommandations pour le choix d’un graphiste?

Les recommandations pour le choix d’un graphiste sont :

  • S’informer de l’expérience de cette personne car l’édition de livres est bien particulière. Il est préférable de choisir un.e graphiste spécialisé.e dans ce domaine (édition).

  • Se fier à son intuition. C’est durant une première conversation avec un potentiel graphiste qu’on voit si le courant passe. Il faut avoir la conviction que graphiste va saisir ce que le client veut.

8. Quels conseils donneriez-vous à un jeune qui veut se lancer dans cette voie?

Pour un jeune graphiste qui désire se lancer dans cette voie, je lui conseille d’abord de trouver une école de graphisme qui a un bon corpus de cours assigné à cette spécialisation. Puis, de trouver une entreprise spécialisée en édition de livres où il va pouvoir acquérir de l’expérience.

9. Y a-t-il des préjugés par rapport à ce métier?

Les préjugés auxquels on peut penser par rapport à ce métier, c’est que le graphiste pour l’édition de livres c’est un peu « matante ». Les jeunes pleins d’énergie et de créativité ne choisiront pas d’emblée cette voie.

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